«Il n’y a pas un seul jeune qui devrait revivre ça» – Alex Belzile
Alex Belzile espère que les récents témoignages d’horreur sur les initiations au hockey junior majeur feront réfléchir et empêcheront que ce genre d’abus se reproduisent.
«Il n’y a pas un seul jeune qui devrait revivre ça dans la vie», a soutenu l’attaquant après son entraînement au Centre Bell, en avant-midi, ajoutant que «c’est vraiment plate d’entendre et de voir que pour certains joueurs, ç’a été l’enfer, leur stage junior».
«J’ai lu un peu [ce qui a été écrit sur les abus qu’auraient vécus des recrues] et ce n’est pas rose, rose, a-t-il ajouté. De faire vivre des choses comme ça à des adolescents… c’est pas recommandé, mettons. On est rendus en 2023 et il faut évoluer dans la vie.»
«Tu suis un peu»
Belzile a tenté de se rappeler comment pouvait se sentir un jeune de 15 ou 16 ans qui se pointe au sein d’une nouvelle équipe.
«Quand tu es dans le moment présent, tu ne sais pas si c’est normal ou pas. À cet âge, c’est aussi difficile de comprendre si c’est acceptable. Tu ne veux pas devenir différent des autres, alors tu suis un peu», a expliqué celui qui a inscrit son premier but dans la LNH, dimanche, dans une victoire face aux Oilers d’Emonton.
L’ailier de 31 ans en avait 18 quand il est arrivé avec l’Océanic de Rimouski en 2009-2010. Il n’a pas vécu d’initiation et il a été surpris d’apprendre les sévices que d’autres hockeyeurs ont pu vivre.
«Je sais pas si j’avais la tête dans le sable, mais dans mon stage junior, j’ai eu vraiment du plaisir, a dit Belzile. Les plus vieux étaient super gentils. Zéro, zéro ; pas une fois où ça a passé proche de voir ou d’être témoin de ça. On entend tous des histoires et on se dit : “Ah, c’est ailleurs ou peut-être que le monde en met un peu.” Mais quand il y a un article comme ça qui sort, ça te remet en question.»
L’esprit d’équipe
Rafaël Harvey-Pinard, comme son coéquipier, n’a jamais été témoin d’une initiation qui a mal viré, tant chez les juniors que chez les professionnels. Et le rapide attaquant croit que ces rites de passage doivent demeurer, mais toujours dans la joie et la bonne humeur.
«Je trouve que les initiations restent importantes, a soutenu Harvey-Pinard. Tu veux intégrer les nouveaux à l’équipe. Mais il y a une façon de le faire. Ça doit rester dans le respect. C’est la clé pour les initiations. Moi, j’ai de beaux souvenirs de mes initiations. Ça reste de beaux moments. J’ai appris à connaître les gars et je trouve que ça soudait l’équipe.»
Les initiations doivent se faire dans le respect, selon Martin St-Louis
Martin St-Louis croit que les initiations sont là pour qu’une « personne se sente la bienvenue » au sein d’un groupe, mais que le rite de passage doit se faire dans le respect.
«Il y a des façons de le faire avec beaucoup de respect. Ça fait longtemps que ça devrait être comme ça. Dans le sport ou une entreprise, il y a des façons [de bien faire les choses]. C’est triste d’entendre une histoire comme ça, mais [c’est] bon de [s]’améliorer», a mentionné l’instructeur du Canadien, en fin d’avant-midi, au terme de l’entraînement des siens au Centre Bell.
Au cours des derniers jours, les témoignages troublants d’anciens joueurs ont été dévoilés, certains rapportant avoir été victimes d’abus, d’intimidation, d’humiliation, de tortures et d’agressions sexuelles lors d’initiations au sein d’équipes du junior majeur de partout au pays.
St-Louis n’a pas évolué dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec, ayant plutôt pris le chemin de l’Université du Vermont après son stage midget AAA et un passage à Hawkesbury au niveau junior A. Discret
Ce qui ne l’a pas empêché d’être initié. Toutefois, il n’a pas voulu étaler son expérience personnelle sur la place publique.
L’homme de 47 ans reconnaît que les derniers mois n’ont pas été faciles pour l’image du hockey junior, Hockey Canada ayant notamment été au cœur de scandales sexuels.
«Le sport amène beaucoup de positif, a assuré St-Louis. Mais il y a parfois de très gros négatifs. Ça peut devenir une grosse tache noire. On doit s’assurer de ne plus voir de tache noire. [Ce n’est] pas une personne qui peut changer ça, c’est d’y arriver collectivement pour protéger les jeunes.»
«On a tous entendu des histoires du genre» – Tyler Johnson
L’attaquant des Blackhawks de Chicago Tyler Johnson n’a jamais vécu d’abus lors d’initiations, mais il est conscient que des débordements ont déjà eu lieu.
«On a tous entendu des histoires du genre, mais je n’ai jamais eu à gérer ça, a-t-il mentionné aux médias, quelques heures avant d’affronter le Canadien. Il n’y a juste pas de place pour le harcèlement.»
Johnson se souvient que les recrues devaient transporter l’équipement de leurs coéquipiers ou de l’eau, rien d’humiliant.
«Quand tu forces quelqu’un à faire quelque chose qu’il ne veut pas, c’est là que tu as un problème», a soutenu l’ancien des Chiefs de Spokane, dans la Ligue de hockey junior de l’Ouest.
Quand le défenseur Connor Murphy a lu les témoignages d’anciens hockeyeurs ayant vécu des abus, allant jusqu’à des agressions sexuelles lors d’initiations, il a été troublé.
«C’est triste d’entendre que des gars ont vécu ça. C’est un traumatisme qui peut te suivre pendant toute une vie. J’espère qu’il y a des précautions aujourd’hui et que les équipes prennent ça au sérieux. Ce sont des enfants, des adolescents. Ce sont des choses qui ne devraient jamais arriver, qui ne devraient pas être cachées et ressortir des années plus tard», a indiqué le numéro 5 des Blackhawks.
Chanter et apporter de l’eau
De son côté, l’entraîneur-chef des Hawks, Luke Richardson, n’a rien vécu de dégradant lorsqu’il était un jeune athlète, notamment avec les Petes de Peterborough, dans la Ligue junior de l’Ontario.
«Nous avions du plaisir. Nous devions nous lever sur la table au dîner à l’école et chanter des chansons de McDonald’s… Des trucs drôles, a raconté l’ex-instructeur chez le Canadien. Notre équipe gardait le contrôle. Nous avions de bonnes personnes au sein de notre organisation. Nous pouvions faire les clowns, mais nous restions sur le bon chemin.»
«J’étais un jeune garçon, je ne vivais plus à la maison, mais j’avais la chance de jouer à l’intérieur d’une équipe au sein de laquelle il y avait une culture saine, a ajouté Richardson. Tu dois contrôler les actions des jeunes. Tu peux créer des traumatismes si tu dépasses les limites. Je sais que les ligues dans le junior ont un meilleur contrôle aujourd’hui. Les jeunes ont besoin de jouer dans un environnement sécuritaire.»
– Avec la collaboration de Jean-François Chaumont