EXCLUSIF | L’entraîneur de Matvei Michkov remet les pendules à l’heure – TVA Sports
Une fois son contrat avec le SKA Saint-Pétersbourg terminé à l’issue de la saison 2025-2026, Matvei Michkov sera «libre à 100% de faire ce qu’il veut, y compris se joindre à l’équipe de la Ligue nationale de hockey (LNH) qui l’aura repêché».
Daniel Bochner, entraîneur adjoint au SKA et instructeur en charge du développement des joueurs de l’organisation, est natif de Toronto. En plus de son rôle avec le club de Saint-Pétersbourg, on lui a confié, en 2018, les clés du développement des patineurs de toutes les équipes nationales russes. Il travaille avec Michkov depuis ce moment.
Autrement dit, il est probablement l’un des intervenants les plus crédibles pour donner l’heure juste sur tout ce qui touche le jeune espoir de 18 ans, y compris l’incertitude entourant son futur.
Via un généreux entretien zoom (que vous pouvez voir en intégralité ci-dessus), Bochner a rapidement et très clairement démenti certains mythes et rumeurs entendus à gauche et à droite, ces derniers mois. Et Dieu sait qu’il y en a eu (et qu’il y en a encore) à la tonne!
L’homme de 38 ans s’est d’abord attaqué à l’une des théories les plus populaires selon laquelle Michkov pourrait être forcé de demeurer avec Saint-Pétersbourg au terme de son contrat.
«Mettons quelque chose au clair : le SKA ne retient pas les athlètes contre leur gré. Depuis mon arrivée avec le club, Artem Zub, Vladislav Gavrikov, Alexander Barabanov, Igor Shesterkin, Artemi Panarin, Kirill Marchenko, Vasily Podkolzin et Andrei Kuzmenko ont tous quitté pour la LNH à la fin de leur entente. Et on parle d’excellents joueurs! Je pense que quand tu as un bon programme et que l’un de tes représentants souhaite aller démontrer son savoir-faire contre les meilleurs joueurs au monde dans la LNH, les choses se mettent en place d’elles-mêmes.
«Bien sûr, le SKA honore les contrats. Toutes les équipes professionnelles le font! Mais en dehors de ceux-ci, les gars sont complètement libres de signer où ils le veulent. Notre équipe est une référence en matière de bon développement et tous nos joueurs qui ont quitté vers la LNH en sont la preuve. Cette façon de faire continuera dans le futur et Matvei Michkov n’est pas différent des autres. Ce n’est qu’une question de temps, dans son cas.
«Les gens disent qu’ils sont inquiets de repêcher des joueurs de la KHL. Tous les bons joueurs russes finissent dans la LNH. J’ai beau réfléchir, je ne parviens pas à trouver une seule étoile d’ici qui n’a pas traversé en Amérique du Nord.»
Voilà qui pourrait difficilement être plus clair, vous ne trouvez pas?
Cet enjeu maintenant abordé, laissons les prochaines lignes s’attaquer aux trois autres craintes transformant un joueur potentiellement générationnel, Matvei Michkov, en «plus grand risque du repêchage» (selon plusieurs).
1. Développement de Michkov d’ici 2026: aucun problème à l’horizon, jure Bochner
Ignorer les cas où certains espoirs russes repêchés dans la LNH sont, par vengeance et/ou chantage, cloués au banc par leur équipe de la KHL lorsqu’ils sont en fin de contrat serait de l’aveuglement volontaire. Ces situations existent et ont été vues régulièrement dans le passé.
Évidemment, il fallait aborder le sujet avec Daniel Bochner.
Question : «peux-tu me confirmer, en tant que responsable du développement de Matvei, que vous ferez tout en votre pouvoir pour qu’il soit le meilleur joueur possible à la fin de son entente, que vous ne le punirez pas en le laissant moisir sur le banc?»
Réponse : «absolument! À 100%. Son développement est vraiment notre priorité. Fais juste regarder comment on a enligné les choses avec lui cette année. Matvei a commencé sa saison avec le SKA dans la KHL. Il a joué trois matchs avec nous, mais n’avait environ que trois minutes de temps de glace par soir. Nous avons rapidement compris que tout ça n’était pas bon pour lui. Nous l’avons donc cédé à notre équipe du SKA dans la VHL (l’équivalent russe de la Ligue américaine).
«Après une vingtaine de matchs, poursuit Bochner, il était tout simplement trop fort pour ce circuit, donc encore une fois, nous avons opté pour la meilleure stratégie possible afin de le développer efficacement: nous l’avons prêté au HC Sotchi, une autre formation de la KHL, même s’il aidait énormément notre équipe de la VHL. Nous aurions pu être égoïstes, mais nous devions penser à Matvei. Et Sotchi, qui n’était pas une puissance en KHL, allait lui donner l’opportunité d’avoir beaucoup de temps de glace contre des professionnels.»
On dit que les faits parlent plus que les paroles. C’est vrai. Et il faut justement avouer que les actions prises l’an dernier par le SKA au niveau du développement de Michkov.sont beaucoup plus rassurantes qu’alarmantes.
Ajoutons à cela la qualité du programme hockey de Saint-Pétersbourg (entraîneurs, installations) et nous avons quelque chose de très encourageant.
2. Oui, Matvei Michkov veut jouer dans la LNH
L’intertitre ci-haut parle de lui-même.
Et ça tombe bien, car il est directement inspiré de confidences émises par deux personnes qui connaissent très bien le dynamique attaquant. Bochner, encore une fois, mais aussi Dmitri Zavgorodniy, un joueur du HC Sotchi avec qui Michkov a passé un long segment de la dernière saison.
Pourquoi prendre la peine d’aborder le sujet? Parce que certaines personnes, ces derniers temps, ont émis des doutes quant aux véritables intentions de Michkov par rapport au circuit Bettman.
«Il veut assurément jouer dans la LNH, lance sans détour Zavgorodniy, un ancien de l’Océanic de Rimouski dans la LHJMQ. C’est son rêve! Dis-toi que tous les joueurs de hockey désirent évoluer dans la LNH et gagner la coupe Stanley. Je peux te dire qu’il est très excité d’être repêché. Il me demande souvent comment les choses se passent au Canada et aux États-Unis. Il me demande ce que les dirigeants des différentes équipes regarderont chez lui et comment il doit se comporter. Je fais juste lui répéter de rester lui-même. Les gens vont l’aimer très rapidement.»
Daniel Bochner, à sa façon, va dans le même sens.
«Quand l’on s’attarde à la personnalité de Matvei, il est clair qu’il souhaite être le meilleur, tout simplement. Tout ça veut aussi dire qu’il veut logiquement jouer sur la plus grande scène possible. Et on sait tous quelle est la plus grande scène du hockey…»
3. Quelle mauvaise attitude?
Récemment, on a aussi pu lire/entendre à certains endroits que l’attitude de Michkov n’était pas la meilleure. Les commentaires négatifs le concernant mentionnaient qu’il n’était pas le joueur le plus travaillant et qu’il avait mauvaise presse auprès de ses coéquipiers.
L’avis de Zavgorodniy d’abord.
«Mes premiers souvenirs concernant Matvei sont ceux d’un jeune homme qui ne veut jamais quitter la glace et qui parle à tous les gars comme s’il les connaissait depuis des années. Je me souviens m’être dit : “wow. Qui est ce fou?”. Rapidement, j’ai constaté tout son talent et tout l’amour qu’il avait pour le hockey. Parfois, j’arrivais à l’aréna pour l’entraînement et il était déjà sur la glace à s’exercer et à tenter des choses dont lui seul a le secret.
«Il est extrêmement compétitif, poursuit le joueur du HC Sotchi. Il consacre d’innombrables heures à l’amélioration de son jeu. Il veut constamment trouver de nouveaux moyens de se démarquer. D’ici quelques années, grâce à son travail, on pourra dire qu’il est le joueur de hockey parfait.»
Bochner vante lui aussi l’ardeur au travail de son protégé, mais également sa grande maturité.
«Très, très mature. Quand il vient à l’aréna, tu sens que c’est pour travailler. Il est extrêmement concentré à la tâche. Il a en lui ce désir d’être le joueur qui veut faire la différence dans les grands moments et il travaille en ce sens. Il est vraiment un grand leader et exerce son leadership via son rendement sur la glace.»
Et qu’en est-il de son comportement dans le vestiaire? Zavgorodniy y va d’une anecdote à la fois loufoque et révélatrice de la véritable personnalité de Michkov.
«Bon, parfois, il est expressif (rires). C’est un très bon gars, mais il y a des soirs où, au début de son séjour avec nous, ses émotions ont pris le dessus. Lors de certains matchs où l’on perdait, il se levait dans le vestiaire et y allait de discours de motivation remplis de rage et d’intensité. Je vous rappelle qu’il n’a que 18 ans à peine et qu’il était alors entouré de vétérans! Il était bien intentionné, mais il a appris au fil de l’année à faire ça… de la bonne façon (rires)!
«Les gars ont fini par comprendre que tout ce qu’il faisait était pour le bien de l’équipe et lié à son amour du jeu. Et tout le monde a assimilé qu’il avait juste beaucoup de leadership en lui. En dehors de la glace, il est très calme et très drôle et on l’a beaucoup apprécié.»
Un potentiel joueur de 100 points
Tout est toujours question de perspective, mais si vous interprétez les commentaires ci-haut de la même façon que l’auteur de ces lignes, le portrait global concernant Michkov est plutôt rassurant finalement, non?
Évidemment, l’équipe de la LNH qui optera pour lui au prochain repêchage aura elle aussi vu les choses de cette manière. Et cette équipe ajoutera instantanément un joueur au potentiel infini à sa banque d’espoirs.
«Quand tu regardes ça d’un point de vue strictement analytique, avance son entraîneur, il est assurément sur le bon chemin pour être en mesure d’être un joueur de 100 points par saison dans la LNH. Il a battu tous les records dans la MHL et sa moyenne de points par match dans la KHL est la meilleure de toute l’histoire du circuit pour un joueur admissible au repêchage de la LNH. Quand tu vois un joueur qui est presque encore un enfant dominer autant que ça dans une ligue comme la KHL, ça en dit très long. Et chaque fois où il a été impliqué dans une compétition internationale, il a brillé.»
«Bien sûr qu’il a le potentiel pour amasser 100 points en une saison dans la LNH!», acquiesce Zavgorodniy.
«Il est arrivé dans la KHL en tant qu’enfant et il a montré à des hommes comment jouer! Matvei est tellement intelligent. Il a juste un don pour trouver des façons de marquer et des façons de bien faire paraître ses partenaires.»
Lorsqu’on demande aux deux intervenants quelle est la plus grande force de Michkov sur la glace, un aspect émerge rapidement : son intelligence.
«Son QI hockey est vraiment ce qui m’impressionne le plus, confie Bochner. Et quand je parle d’intelligence, je parle de capacité à analyser le jeu autour de lui en cherchant, dans un court laps de temps, à exécuter le jeu qui sera le plus bénéfique pour son équipe. Plusieurs excellents joueurs vont profiter du temps qu’ils ont pour simplement placer la rondelle derrière les défenseurs ou vont tenter une passe en espérant qu’il se passe quelque chose de bien.
«Matvei, lui, a cette immense qualité lui permettant de trouver une solution à tout… quand les autres n’y parviennent pas. Imagine à quel point c’est un atout pour son équipe!»
Zavgorodniy est du même avis.
«Je dirais que son jeu en possession de la rondelle, toutes catégories confondues, est formidable. Quand il en a possession, c’est extrêmement difficile de la lui soutirer. Et il la demande constamment! Il veut être celui qui fait la différence. Il veut être le leader et orchestrer les jeux, mais il aime aussi les terminer! Il a seulement 18 ans, mais parfois il revient au banc et il dicte le jeu à faire à ses compagnons de trio. Et le pire, c’est que ses propositions fonctionnent souvent!»
Un petit qui «joue très gros»
À 5 pieds 10 pouces et 170 livres, Michkov n’est pas le plus imposant. Il était donc naturel de demander à nos interlocuteurs ce qu’ils pensaient de cette réalité et de l’impact qu’elle aurait une fois la transition du Russe vers la LNH complétée.
«Matvei n’a peut-être pas la plus grosse stature, mais il joue très gros, insiste Daniel Bochner. Il place toujours son corps de façon à garder la rondelle, il n’a pas peur d’aller au contact et il aime jouer à l’intérieur des points. Il aime amener la rondelle au filet par lui-même et il est fort sur ses patins grâce à son centre de gravité très bas. On a déjà pu voir son aisance à jouer contre des joueurs plus gros que lui dans la KHL. Ça devrait déjà clore le débat, surtout qu’on sait aussi qu’il continuera de prendre du poids et de la force dans les prochaines années. Je n’ai vraiment pas peur pour lui au prochain niveau.»
«Au départ, en le voyant, j’étais persuadé qu’il aurait certaines difficultés à se tirer d’affaire contre des gars plus gros que lui, confie Zavgorodniy. Mais je me suis rapidement rendu compte qu’il était extrêmement solide et difficile à déplacer! Comme je vous le disais, il est aussi très intelligent, sachant où être et où se rendre sur la patinoire pour éviter les situations potentiellement dangereuses. Il n’est pas le plus gros. C’est un fait. Mais il joue selon ses forces et elles sont très nombreuses, donc ça fait de lui un joueur très imposant… à sa manière.»
«On travaille fort là-dessus»
Matvei Michkov est un espoir spécial. C’est indéniable. Mais un joueur de hockey, aussi bon soit-il, aura toujours quelque chose à travailler. Surtout à 18 ans.
En une phrase, Bochner confirme (à nouveau) que le développement du jeune homme sera tout le contraire d’être affecté, lors des prochaines saisons qu’il passera en Russie.
«Son patinage est toujours à peaufiner, spécialement pour lui qui vise la LNH, avance l’instructeur qui, clairement, ne met pas Michkov sur un piédestal malgré tout le respect qu’il lui voue. La LNH est un circuit où les joueurs se replient vite et où le jeu est très serré. Nous travaillons beaucoup avec Matvei sur la façon dont il attaque la zone neutre et le territoire adverse. Il a encore besoin d’un peu plus d’explosion et doit notamment travailler sur ses mouvements latéraux pour atteindre les standards souhaités.
«Ce qui est toutefois encourageant, c’est que c’est aussi le secteur où il a selon moi le plus progressé en quatre ans. À 14 ans, il avait déjà un excellent tir, de sublimes mains et lisait le jeu à un très haut niveau. Mais son patinage est un aspect de son jeu que tout le personnel du SKA et moi avions ciblé et souhaitions améliorer. Matvei a mis beaucoup d’efforts là-dessus et les résultats se font sentir et continueront d’être flagrants dans les prochains mois.»
«Matvei au rang numéro cinq serait un vol»
À l’heure actuelle, plusieurs sont d’avis que l’incertitude (y en a-t-il vraiment tant que ça?) entourant Michkov le fera chuter hors du top 4, au prochain repêchage.
Si tel est le cas, les Canadiens de Montréal auront une décision à prendre : en font-ils un espoir du club… ou le laissent-ils en plan?
«Matvei Michkov au rang numéro cinq est un vol, lance Bochner sans même hésiter. S’il jouait dans la LCH, il sortirait premier ou deuxième de cet encan-là. S’il se retrouve hors du top 3, cela deviendra pour les autres équipes une chance incroyable d’ajouter un joueur de classe mondiale à leur effectif… à un rang où il n’y en a habituellement pas.»
Dmitri Zavgorodniy y va lui aussi d’une déclaration qui ne laisse place à aucune interprétation.
«Si j’étais le directeur général des Canadiens et que je me rendais compte que Matvei était toujours disponible au cinquième rang, je serais d’abord sans voix… et je le prendrais assurément! Ce gars-là relève instantanément le niveau de compétition de ton équipe.»
L’ex-coéquipier d’Alexis Lafrenière à Rimouski termine sur une phrase qui en fera sourire plusieurs parmi les partisans du Tricolore.
«Matvei est comme les gens de Montréal : il est un passionné de hockey! Il est l’un des vôtres! Michkov et Montréal, ça sonne “mélange parfait” pour moi!»
Dans un mois, on verra si Kent Hughes et ses acolytes pensent la même chose…