Les frissons de Leylah à Montréal – TVA Sports

Leylah Annie Fernandez se rappellera longtemps cette semaine devant ses partisans. Elle a vécu l’euphorie de gagner sur le court central avec l’appui de près de 11 000 spectateurs.

«Je vais retenir les frissons que j’ai sentis chaque fois que j’entrais sur le terrain et que le public criait mon nom et m’applaudissait. C’est ce que je préfère. Je sais que les gens sont là pour me voir jouer, mais aussi pour s’amuser parce qu’ils aiment mon jeu, qu’ils aiment le tennis», a raconté Leylah, dans la nuit de jeudi à vendredi, après sa défaite face à l’Américaine Danielle Collins.

Il y avait longtemps qu’une Québécoise n’avait pas enflammé le stade IGA. Il y a déjà eu les Françoise Abanda, Stéphanie Dubois, Aleksandra Wozniak, Marie-Ève Pelletier et Valérie Tétreault, mais ça remonte à quelques années.

«Elle anime le public, elle amène la foule avec elle, a apprécié le père de Leylah, Jorge Fernandez, en entrevue avec Le Journal vendredi. Ça, pour moi, c’est sa spécialité. On n’a pas beaucoup de joueurs ou de joueuses qui peuvent amener les gens dans une direction. Des fois, c’est presque dramatique! J’aime ça. Ç’a été un très beau spectacle.»

Sa meilleure performance de l’année

M. Fernandez faisait référence à la victoire de sa fille contre la 11e tête de série du tournoi, la Brésilienne Beatriz Haddad Maia, mercredi en fin de journée, dans une ambiance tout simplement électrique. Pour lui, il s’agissait d’un des meilleurs matchs de la 81e mondiale cette saison.

«On a commencé à voir l’ancienne Leylah, ce qui est drôle à dire quand on pense qu’elle a seulement 20 ans!» a lancé l’homme qui agit également à titre d’entraîneur auprès d’elle. «C’est ça qu’on est habitué de voir d’elle, un jeu plus offensif et varié. Elle a bien varié son service, qui n’était pas toujours en puissance ou en vitesse.»

Transportée par l’énergie des fans, Leylah a vécu une semaine de rêve, signant ses deux premières victoires dans un tableau principal dans sa ville natale, atteignant le troisième tour pour la première fois au tournoi canadien – elle avait disputé deux rencontres l’an dernier à Toronto. De plus, elle n’avait pas collé deux gains lors d’un tournoi de la WTA depuis février, au Qatar.

De la pression

M. Fernandez estime avoir bien préparé sa protégée afin qu’elle gère bien la situation et qu’elle puisse profiter du moment.

«On a eu des conversations pour ne pas oublier que les amateurs sont avec elle, ils l’aiment beaucoup. Des fois, on est dans le feu d’action, c’est émotif et on commence à s’énerver un peu. On devient plus nerveux, plus anxieux», a-t-il expliqué. 

«C’est aussi correct de perdre en devant eux, a ajouté M. Fernandez. Elle se met beaucoup plus de pression, elle veut vraiment avoir des résultats positifs, non seulement pour elle, mais pour le public. Et surtout quand elle joue à Montréal. Elle veut leur donner beaucoup de joie, de plaisir, et quand ça va ne va pas comme elle le souhaite, ça devient plus frustrant que dans n’importe quelle autre ville en Amérique du Nord.»

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Crédit photo : Photo d’archives, Jessica Lapinski

Une expérience en or

Malgré la douleur de la défaite, Leylah est apparue relativement sereine devant les journalistes, un peu passé minuit. Elle voyait le verre à moitié plein.

«Je suis heureuse d’avoir eu la chance de vivre l’expérience de jouer devant une foule partisane, des gradins remplis. J’ai apprécié passer du temps avec ma famille et mes amis que je n’avais pas vus depuis longtemps. J’ai revu des endroits où j’ai grandi, et ça m’a rappelé des souvenirs», a-t-elle commenté.

Les entraînements avec son père et sa sœur, Bianca, – qui a perdu en qualifications – resteront également gravés dans la mémoire de la petite gauchère.

Crédit photo : Photo Martin Chevalier

Vers Cincinnati

Maintenant que son tournoi à Montréal est terminé, Leylah n’a pas eu beaucoup de temps pour se reposer. Au lit, aux petites heures du matin, elle qui s’endort généralement tôt, elle s’apprêtait vendredi après-midi à monter dans un avion avec son père en direction de Cincinnati, où elle disputera les qualifications dès samedi, face à l’Américaine Emma Navarro, neuvième favorite de cette étape du tournoi.

«On a dû partir de Montréal assez rapidement, a admis M. Fernandez. C’est dommage, parce qu’on aurait bien aimé rester une ou deux journées de plus pour visiter les amis et partager de bons repas.»

En raison de son classement, même si elle devrait grimper autour du 70e rang mondial lundi, Leylah doit maintenant se qualifier pour disputer les tournois importants. 

Mais ses récentes performances laissent entrevoir de belles choses. À Washington, elle a sauté quatre fois sur le terrain, dont à deux reprises en qualifications. Puis, à Montréal, elle était à un match d’obtenir son billet pour les quarts de finales.

«Ça fait un petit bout de temps que Leylah a de la misère sur le circuit, a avoué son père. J’ai recommencé à travailler avec elle il y a quelques semaines [après la rupture avec l’entraîneur espagnol Julian Alonso]. J’ai vu beaucoup de progrès qu’on n’avait pas eu depuis longtemps. Et bien sûr d’être en avant du public et d’avoir tout le monde qui chante son nom et d’essayer de l’animer un peu, ça aide. Elle a bien réagi.»

Sa préparation en vue des Internationaux des États-Unis, où elle a été finaliste il y a deux ans, va donc bon train. 

Encensée par ses paires

Depuis le début de l’Omnium Banque Nationale de Montréal, Leylah Annie Fernandez a été sous les feux des projecteurs et plusieurs athlètes ou anciennes joueuses lui ont lancé des fleurs. En voici un résumé.

«En espérant qu’elle puisse prendre un peu de recul et se concentrer sur tout le positif qu’il y a à retenir de son parcours. […] Je pense qu’elle a adoré son expérience avec le public montréalais et espérons que cette espèce d’énergie-là qui est passé entre le public et elle puisse la lancer dans les prochaines semaines. Ce n’est pas rare qu’on connaît un bon tournoi et qu’après on voit l’impact dans les semaines à venir. Hier après son match, j’ai eu la chance de lui dire qu’on a déjà hâte de l’accueillir dans deux ans.» -Valérie Tétreault, directrice de l’Omnium Banque Nationale de Montréal et ancienne joueuse professionnelle

«Elle a beaucoup de talent. Nous nous sommes entraînées ensemble une ou deux fois. Elle peut faire des coups droits qui vont très vite, on ne s’y attend pas quand on la voit. Mais elle sait le faire et elle frappe la balle très tôt. Elle sait aussi être proactive et mettre de la pression sur son adversaire.» – Iga Swiatek, numéro 1 mondiale

«Je signe des autographes en tant que moi-même, mais occasionnellement, j’en signe en tant Sloane [Stephens], Venus [Williams], Serena [Williams], Taylor [Townsend], Alycia [Parks], et hier, j’ai eu Leylah pour la première fois!» – Coco Gauff, 7e mondiale

«Elle a une excellente attitude sur le terrain, c’est une incroyable compétitrice. Je crois qu’elle est très bonne pour notre sport. Quand on la regarder jouer, on sent qu’on fait partie du spectacle, on se sent impliqué. […] Elle transmet son énergie et on veut l’encourager. Chaque fois que je la vois sur le terrain, je me range toujours derrière elle, car on ressent quelque chose avec elle.» – Venus Williams, ancienne numéro 1 mondiale

«Ce n’est jamais facile d’affronter la favorite du public parce qu’elle joue à domicile. Cela aide énormément la joueuse locale d’avoir beaucoup de fans, ce qu’on comprend parfaitement.» – Danielle Collins, 48e mondiale, qui a éliminé Leylah

«Leylah a mieux joué. Je crois qu’elle le méritait parce qu’elle a été plus agressive, et dans les moments difficiles, elle a été meilleure que moi. Je lui souhaite le meilleur pour la suite. C’est spécial pour elle de jouer à la maison.» – Beatriz Haddad Maia, 12e mondiale, battue par Fernandez au deuxième tour

«C’était vraiment amusant de jouer sur le central. C’est ma première présence au tournoi canadien, alors c’était définitivement une belle expérience. Ça ne s’est terminé comme je l’aurais souhaité, et je n’ai pas performé que je le voulais, mais Leylah a vraiment bien joué. Au final, elle a conclu en force pour l’emporter.» – Peyton Stearns, première adversaire de Fernandez et issue des qualifications

«Ça m’a pris 10 ans pour comprendre [qu’une carrière, ça passe vite] et elle comprend déjà tout. Quand tu aimes gagner, ce n’est pas la même adrénaline que tu vas retrouver en jouant aux cartes ou au ping-pong.» – Marie-Ève Pelletier, analyste à TVA Sports et ancienne joueuse professionnelle 

-Avec la collaboration de Dave Lévesque