La révolution de velours saoudienne à Newcastle
Avec des recrutements judicieux et sous la houlette du discret mais tatillon Eddie Howe, Newcastle est redevenu une place forte du soccer anglais, un an et demi après la polémique sur son rachat par les Saoudiens.
Les résultats parlent d’eux-mêmes: le 26 février, à Wembley, les Magpies affronteront Manchester United en finale de la Coupe de la Ligue. Actuellement 3e de la Premier League, ils pourraient aussi se qualifier pour la Ligue des champions à la fin de la saison.
Pour le club du nord de l’Angleterre, finaliste malheureux à quatre reprises depuis son dernier trophée, une Coupe d’Angleterre en 1955, et deuxième de Premier League en 1996 et 1997, l’âge d’or semblait n’être qu’un lointain souvenir.
Il y a deux ans encore, le club jouait le maintien et l’échec d’une première tentative de rachat par les Saoudiens, en 2020, avait eu le goût trop familier des occasions ratées.
Mais les Saoudiens sont revenus à la charge en 2021 avec une offre légèrement supérieure à 350 M EUR et des garanties sur le fait qu’en dépit de la présence du fonds souverain saoudien FPS à hauteur de 80% au capital du club, le gouvernement n’aurait aucune rôle dans la gestion du club.
Avec un mécène pesant alors 400 milliards d’euros, Newcastle devenait subitement le club le plus riche au monde et les craintes de le voir dépenser sans compter pour venir bousculer la hiérarchie du football anglais étaient fortes.
« On ose y croire à nouveau »
Malgré la très mauvaise réputation du régime saoudien sur le respect des droits humains, soulignée notamment par l’ONG Amnesty International pour critiquer le rachat, les supporters se sont pris à rêver d’une renaissance sportive.
Amanda Staveley, entremetteuse dans cette transaction et membre du conseil d’administration du club, leur avait promis que « Newcastle se (battrait) régulièrement pour les trophées majeurs » et l’emblématique attaquant et supporter des Magpies Alan Shearer avait tweeté, le jour de l’annonce du rachat, « on ose y croire à nouveau ».
S’il est indéniable que Newcastle a mis un coup de pied dans la fourmilière de la Premier League, sa progression ne doit cependant pas tout à des dépenses inconsidérées.
Avec 280 millions d’euros dépensés lors des trois dernières fenêtres de transferts, les nouveaux maîtres de St James’ Park ont certes démontré leur prodigalité mais les recrues ont été bien ciblées et il n’y a pas (encore?) eu de recrutement tape-à-l’oeil.
Le latéral international anglais Kieran Trippier pour 14 M EUR, le milieu brésilien Bruno Guimaraes pour 42 M EUR, le gardien Nick Pope pour 15 M EUR ou Sven Botman, acheté 37 M EUR à Lille et qui commande la meilleure défense de Premier League (11 buts encaissés en 20 matches), semblent tous d’excellentes affaires.
Le doublé inscrit mardi, lors de la demi-finale retour de Coupe de la Ligue contre Southampton par Sean Longstaff, né et formé au club, montre aussi que la filière locale a peut-être encore un avenir dans ce « new-Newcastle ».
Eddie Howe, homme-clé du rebond
« C’est incroyable. Si on avait dit il y a douze mois que tout cela allait arriver, tout le monde aurait ri », a-t-il commenté après le match. « Depuis le rachat, on a fait venir des joueurs de qualité. C’est vraiment spécial et émouvant pour moi de voir ce qu’on bâtit ici. »
Au premier rang des choix fondateurs de cette success-story figure celui de l’entraîneur Eddie Howe qui avait emmené Bournemouth de la D4 à cinq saisons en Premier League, de 2015 à 2020.
Contrairement à Graham Potter, qui peine à convaincre à Chelsea, Howe (45 ans) a totalement convaincu les sceptiques, faisant de Joelinton ou Dan Burn, des joueurs longtemps considérés comme moyens, des cadres indiscutables.
On peut apercevoir ce bourreau de travail 12 heures par jour à Darsley Park, le centre d’entraînement. Et Howe peut à raison affirmer: « La solution de facilité serait de parler d’argent, mais ce n’est pas ce qui nous a amenés où on est ».
« L’esprit d’équipe et la cohésion, c’est ce qui vous emmène loin (…) Se plonger dans la culture (du club) et avoir un groupe soudé, c’est ça, la clé », a-t-il récemment assuré.